Le choix et l’expérience de vivre entre deux pays, de s’investir et de créer un quotidien autant dans l’un que dans l’autre, situe ma démarche artistique dans un entre-deux et a orienté ma pratique vers des processus de traduction questionnant à la fois le langage et le paysage. Ces processus agissent comme des couches, des strates qui viennent créer ou supprimer du sens. Je déconstruis ainsi des repères, en invente de nouveaux, afin de m’approprier les lieux. J’explore ce qu’il se passe entre deux continents, entre deux pays, entre deux quartiers, entre deux rues, entre deux montagnes, au travers de la langue, du paysage, des mouvements des corps et des flux, visibles ou invisibles. J’essaie de donner forme au passage, parfois sous terre, vers le fond des mers ou dans le cosmos.
Dans ce va et vient entre abstraction et prise de repères, je crée des signes, des balises, dessine des flux, des trajectoires, des itinéraires, je les performe, les filme. Cette pratique transdisciplinaire me permet une liberté dans la forme donnée à ces processus de traduction. La marche en est le premier outil. Il s’agit par l’expérience de mon corps, dans des paysages qui me sont inconnus ou en constant changement, de trouver les moyens de marquer, de figer un moment singulier.

«[…] The random, the unscreened, allows you to find what you
don’t know you are looking for, and you don’t know a place until it

surprises you. walking is one way of maintaining a bulwark against

erosion of the mind, the body, the landscape, and the city, and

every walker is a guard on patrol to protect the ineffable […]».


Rebecca Solnit – Wanderlust, A History of Walking